En direct de CoworkCrèche avec Muriel de Mère Bordel…


Justement, parle-moi de ce projet un peu fou de CoworkCrèche, qui représentait un sacré challenge… Qu’est-ce qui t’a inspiré ?

Plusieurs choses…

En premier lieu mon expérience de directrice de crèche associative, au cours de laquelle j’ai rencontré des parents en grande difficulté, qui, malgré tous mes efforts, n’obtenaient pas de place en crèche, alors qu’ils en avaient cruellement besoin. Parmi eux, deux catégories socio-professionnelles étaient fortement représentées : les intermittents du spectacle, dont je connaissais bien les problématiques, pour avoir fait beaucoup de théâtre à mes débuts, et les free-lance, dont je ne savais pas grand-chose à l’époque et que j’imaginais volontiers gentiment glandouiller, jusqu’à ce que je fasse moi-même l’expérience du statut d’indépendant en montant ma boite en 2012 !

Propulsée hors du monde du salariat, je me suis retrouvée confrontée à divers problèmes: la gestion de l’administratif et de ma propre productivité au quotidien, l’absence de vie sociale et surtout la recherche d’un cadre de travail sympa, parce qu’au bout de 3 mois seule dans mon appart, je devenais folle !
J’ai donc commencé à travailler dans des bars et des salons de thé de mon quartier et j’ai réalisé que je n’étais pas la seule, que beaucoup de gens cherchaient à travailler hors de chez eux et que beaucoup venaient avec … leur bébé ! Etre free-lance et parents n’était manifestement pas simple…


A partir de quand le projet s’est-il concrétisé dans ta tête ?

Je me souviens très bien de ce jour de juin 2012, où j’ai su comme une évidence, qu’il fallait que je monte un bureau avec une crèche ! J’ai appelé mon comptable, qui m’a déconseillé de me lancer dans cete aventure aussi rapidement, mais comme je suis quelqu’un de très disciplinée :-), je ne l’ai pas écouté, j’ai monté l’association Coworkcrèche dans la foulée et j’ai candidaté à l’appel à projet de la région Ile de France fin 2012 pour l’édition 2013.  Je ne l’ai pas eu, mais cela m’a fait connaître de la Fonderie, le pôle numérique de la région ile de France, qui a été mon 1er soutien dans l’aventure…


Quel était le projet initial ? Existait-il un équivalent de CoworkCrèche en France ?

Non, pas vraiment, en tout cas, pas dans la configuration actuelle de CoworkCrèche… A Marseille, il existe un petit espace de coworking, lié à une micro-crèche, quelques rues plus loin.

Le projet initial de CoworkCrèche, c’est un espace de coworking avec une crèche idéalement située dans des bâtiments mitoyens.  Évidemment, la réalité du terrain m’a fait revoir un peu mes plans : monter deux très gros projets – un espace de coworking et une crèche – conjointement, dans le même lieu, avec le même timing est parfaitement impossible, surtout au cœur d’une grande ville avec des problématiques de loyers très élevés !
Pour donner à mon projet une chance de voir le jour, j’ai décidé de procéder par étape : monter l’espace de Coworking dans un premier temps, puis y ajouter une crèche par la suite.  Là, j’ai été confrontée à un nouveau problème : Contrairement à un espace de coworking qui s’ouvre en 3 mois, monter une crèche prend énormément de temps – notamment à cause des autorisations – et implique un minimum de 2 ans entre la trouvaille du local et l’ouverture de la crèche ! J’allais donc ouvrir un espace de coworking lambda alors que le projet s’appelle Coworkcrèche ? Certainement pas !

Je suis repartie dans mes réflexions et j’ai envisagé d’ouvrir une micro-crèche dans ces 300 m2 en divisant les locaux en 2.  Mais j’ai rapidement réalisé que je m’éloignais bien trop du modèle associatif et de ce qui me tenait à cœur : aider les parents en difficulté en leur proposant un mode de garde à hauteur de leurs revenus ! En effet une micro-crèche n’est pas financée par la ville, ce qui implique que les parents paient tous 1500 euros… J’ai donc fait une croix sur cette alternative.

J’ai fini par trouver une solution temporaire intermédiaire, assez satisfaisante, même si elle ne répond pas encore de façon exhaustive aux besoins des parents : consacrer une partie de l’espace initialement dédié au coworking à l’accueil de bébés de moins de 9 mois.
Ce n’est pas encore la panacée et on ne peut pas parler de « crèche » ou même de structure d’accueil petite enfance au sens strict du terme puisque les locaux ne s’y prêtent pas (en termes de normes et de surface par exemple)…  Mais l’idée,  avec l’installation de cette maisonnette (ndlr : placée au fond de l’espace de coworking, dans un périmètre sans wifi ),  c’est de permettre aux  parents de venir ponctuellement travailler avec leurs bébés, de se socialiser, de s’entraider etc…  Et ça marche plutôt bien puisque j’ai déjà vu des familles de coworkers s’organiser pour garder les bébés les uns après les autres et profiter de l’espace de travail pour avancer sur leurs projets.

Bien sûr, monter une crèche dans des locaux proches de CoworkCrèche reste une priorité, et je reprends actuellement activement  la recherche de l’espace adéquat…


Aujourd’hui,il n’y a donc pas de personnel qualifié pour garder les enfants, mais est-ce en projet ?

Oui, je réfléchis à un système, qui permettrait de mutualiser les services d’une garde d’enfants, en proposant aux parents coworkers de payer un peu plus cher leurs heures de présence.
Mais il faut garder à l’esprit que CoworkCrèche est forcément une structure où les enfants seront toujours sous la responsabilité de leurs parents. La professionnelle de la petite enfance pourra venir en soutient mais ne substituera en aucun cas à eux !
Évidemment, je souhaite que les parents puissent travailler et se concentrer sans avoir à se préoccuper de leurs enfants.  Tout l’art est de trouver un modèle qui vienne soutenir les parents et qui ne soit pas extravagant en termes de prix.
J’attends des parents qu’ils fassent évoluer le lieu et le concept avec moi.  Et je crois que le message est bien passé.  Moi, j’ai trouvé le lieu et j’ai monté cette structure, qui n’est absolument pas figée et sans doute loin d’être optimale !  J’ai besoin de l’aide et des idées des parents pour en tirer le meilleur parti…


En parlant d’évolution du modèle, quel est l’avenir, selon toi, de CoworkCrèche ?

Dans un  premier temps, j’aimerais exploiter au maximum ces 300 m2, qui sont assez exceptionnels, particulièrement lumineux avec leurs grandes baies vitrées et plein de ressources avec leur cave voûtée…
Mon idée a toujours été d’en faire un espace accueillant et convivial, qui permette aux gens de se retrouver dans une ambiance quasi familiale… La cuisine attenante à l’espace de travail a d’ailleurs été pensée dans cet esprit : se retrouver pour bruncher autour d’une grande table ! D’ailleurs, je souhaite faire  venir très régulièrement des cuisiniers indépendants qui cuisinent sur place et proposent des petits plats fait maison à des tarifs abordables aux coworkers… L’idée serait de les intégrer à la communauté et de les retrouver régulièrement quand on vient passer la journée chez Coworkcrèche !

Je souhaite aussi encourager la solidarité et l’échange de compétences entre co-workers.  J’ai d’ailleurs envie de mettre en place un système de crédit pour le troc de services, sur le modèle des accorderies (ndlr : une heure de service rendu vaut une heure de service reçu, quels que soient la nature, la complexité ou l’effort reliés au service échangé).

Quant à l’évolution du lieu, je suis ouverte à plein de choses et je compte beaucoup sur les gens pour en faire un espace qui réponde à leurs besoins.  Moi, j’ai fait ce que j’avais à faire : que cet endroit existe :-) !  Je dirais qu’il ne m’appartient déjà presque plus aujourd’hui, que je suis juste un liant entre les différentes personnes…  Cet espace deviendra ce que les gens en feront et cela me plaît énormément ! J’ai envie que chacun y trouve sa place, s’y sente chez lui et surtout se l’approprie !

Auteur : Anne-Lise Pernotte

Anne-Lise Pernotte est rédactrice en chef de cotebebe.fr et free-lance dans le digital. Passionnée par le web, l'écriture et l'univers de la petite enfance, elle souhaite apporter un accompagnement bienveillant et éclairé aux futurs et jeunes parents. Elle est aussi l'auteure du premier livre feelgood dédié à la parentalité tardive "avoir un enfant à 40 ans (ou presque)"

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